Formula Student Germany 2021 : L’Écurie Piston Sport Auto (EPSA) sacrée Championne du Monde !
Interview de sa Présidente Garance Diaine (ECL 2020) et Mathieu Jacquet (ECL 2018), Directeur des opérations
L’été 2021 fut celui des premières fois pour l’EPSA. Engagée sur 3 compétitions au Pays-Bas, en Autriche et en Allemagne, l’écurie a dépassé tous ses objectifs avec 3 podiums dont un titre de Champion du Monde sur le circuit mythique d’Hockenheim. Une réussite sur laquelle reviennent Garance Diaine (ECL 2020)– Présidente de l’Écurie Piston Sport Auto pour la saison 2022 – et Mathieu Jacquet (ECL 2018) Vice Président et Directeur des opérations de l'EPSA, qui nous parlent également du futur prototype 100% électrique prévu l’année prochaine.
Bonjour Garance. Quels étaient, sur le papier et avant même de débuter les compétitions, les points forts et les points faibles d’Invictus ?
Invictus est à ce jour une des voitures les plus fiables et robustes de l’EPSA. Elle est également puissante et réglable, comme elle l’a démontré en compétition. En effet, il arrive que les juges du FS nous demandent d’apporter des modifications non négligeables à la voiture. La "flexibilité" d’Invictus nous a permis de nous adapter relativement facilement aux différentes modifications à apporter. C’est cependant une voiture un peu lourde qui pèse 219 kg avec le plein, ce qui n’est pas la meilleure performance de l’EPSA.
De plus, suivant la politique de l'écurie qui demande + 20% de progrès par an, l'EPSA a construit son premier pack aérodynamique avec aileron avant et arrière pour Invictus. Après utilisation du pack sur piste, l'équipe s'est rendu compte que ce dernier ne nous apportait rien en termes de performances. Il nous aurait également causé du fil à retordre lors de l'épreuve du Scrut, car après production, les ailerons ne respectaient pas exactement les contraintes imposées par le règlement du FS. L'équipe a donc tout simplement décidé de présenter Invictus sans pack aérodynamique aux compétitions. Elle a tout de même récolté des conseils des juges pour qu'à l'avenir, nos ailerons respectent le règlement.
Invictus lors de l'épreuve d'Autocross du FSN
Avec le recul, quelles ont été les surprises (bonnes et mauvaises) lors des épreuves ?
La plus grosse surprise de cette série de compétitions est incontestablement la réussite d'Invictus : ses deux podiums (une troisième place sur l'épreuve d'accélération et une deuxième place à l'épreuve du Cost & Design au FSN) et surtout ce titre de champion du monde en Allemagne ! Personne ne s’y attendait.
Les mauvaises surprises sont forcément nombreuses en compétition puisque la voiture est mise à rude épreuve par les juges et la piste. Quelques avaries sur des circuits critiques comme le circuit de frein ont été à déplorer pendant les épreuves et ont demandé beaucoup de travail pour que la voiture puisse repartir en épreuve le lendemain.
Pour finir sur un bon point, Invictus s’est tout de même révélée extrêmement fiable pendant les compétitions. C’est la première fois que l’EPSA avait pour ambition de participer à trois compétitions et notamment au FSG, compétition la plus renommée ! Nous y sommes parvenus et avec beaucoup de réussite en prime.
L'EPSA a remporté la médaille d'or sur l'épreuve d'accélération thermique pour la première fois de son histoire avec un temps de 4,20 s pour parcourir 75 m. Quelles sont les raisons qui ont permis selon vous de réaliser cet exploit ?
Cette épreuve consiste à parcourir le plus rapidement possible une ligne droite de 75 m avec départ arrêté. L’EPSA a brillé début juillet en allant chercher une belle troisième place à l’épreuve d’accélération du FS Netherlands avec un temps éclair de 4,076 s et l’exploit a été réitéré au FS Germany où elle termine sur la plus haute marche du podium avec un temps 4,20 s. Malgré un chrono qui peut paraître moins bon, nous nous imposons sur cette épreuve. La différence s’explique par l’état de la piste qui varie en fonction du circuit et de la météo.
Notre précédent record avait été fixé deux ans plus tôt au FSN avec notre prototype Optimus qui a décroché la quatrième place au FSN. Nous avons cette année mis la barre encore plus haute. Cette réussite est due à notre longue période d’essais et de réglages : nous avons passé de nombreuses heures sur le banc à rouleaux pour régler notre moteur qui tourne aujourd’hui à la perfection, avec une toute nouvelle admission faisant rentrer encore plus d’air qu’avant dans notre moteur. Nous avons aussi passé beaucoup de temps à entraîner les pilotes et à régler l’électronique pour exploiter de façon optimale nos qualités et fournir la meilleure performance sur cette épreuve. Nous avons même mis en place un passage de vitesse automatique qui passe les rapports aux meilleurs moments ! Notre performance n’est pas due au hasard !
L'EPSA autour d'Invictus dans son stand au FSN
Les succès cachent souvent des moments de doute, des urgences qui vous mettent dans le rouge. En avez-vous connu pendant les compétitions, et comment les avez-vous gérés ?
Bien sûr, il y en a tout le temps ! La pire compétition a certainement été la dernière, le FSG. C’est pourtant celle où nous avons le mieux performé. Mais la voiture avait fait une saison entière et commençait à montrer ses limites : nous avons dû travailler dessus tous les jours. Cette tâche n’a pas été simple car la plupart de nos équipiers n’étaient pas entraînés à travailler sur la voiture, à cause de ces 18 derniers mois passés à distance. Une modification sur le véhicule pouvait entraîner une nouvelle avarie à cause du manque d'entraînement. Mais nous n’avons rien lâché (à part notre sommeil !), nous sommes allés jusqu’au bout et notre travail a été récompensé.
Notre méthode, qui s’est révélée gagnante, était de toujours “re-préparer” la voiture pour l’épreuve suivante, en la passant en revue, à chaque sortie d’épreuve. Nous détections ainsi les problèmes suffisamment tôt pour avoir le temps de les corriger. Sans cela, il est certain que nous n’aurions pas fini certaines épreuves.
L’annulation de la compétition l’année dernière pour cause de la Covid vous a donné du temps pour améliorer les performances de la voiture. Sur quels points ont porté vos efforts ?
La crise sanitaire nous a certes fait gagner du temps mais, indirectement, nous en a aussi beaucoup fait perdre. Les professionnels et lycées partenaires touchés par la crise sanitaire travaillaient par exemple beaucoup moins vite ! Notre voiture n’a démarré pour la première fois qu’en janvier 2021 pour ne faire ses premiers tours de piste que courant mars.
Nous étions également en effectif réduit, chaque tâche prenant ainsi beaucoup plus de temps pour être réalisée. À l’heure du bilan, l’équipe a énormément peiné à faire rouler Invictus. Nous avons même pris la décision début juin d’abandonner notre pack aérodynamique qui demandait trop de temps et de main-d'œuvre pour être remis aux normes.
Nous avons néanmoins fait l’effort de réaliser le plus de sessions possible pour atteindre notre objectif de 500 km sur piste, même si la voiture n’était pas prête pour la compétition ! L’objectif était de faire apparaître les éventuels défauts de conception lors des essais. Nos efforts semblaient avoir payés avec un prototype réellement fiable, jusqu’à ce que la suspension casse six jours seulement avant la première « course ». Nous nous sommes remis au travail et avons achevé les réparations seulement la veille du départ !
L'EPSA et ses deux coupes lors de la soirée de remise des récompenses au FSN
C’est la première fois que l’EPSA est engagée sur 3 compétitions au Pays-Bas, en Autriche et en Allemagne. Quels défis cela représente-t-il pour l’écurie ?
Les défis sont multiples : il nous fallait une voiture fiable capable d’encaisser les compétitions sans broncher, mais aussi la capacité d’emmener un minimum de main-d'œuvre sur place. En temps de Covid, il est très difficile de fédérer les coéquipiers : trop peu de personnes étaient formées pour maintenir la voiture en condition de course. Il a fallu se reposer sur quelques personnes qui connaissaient bien le prototype, tandis que les autres ne l'avaient parfois même jamais vu rouler auparavant.
Il faut aussi prendre en compte les coûts que cela engendre : les compétitions coûtent cher et il faut rajouter les frais de logement, de déplacement etc. En attribuant plus de budget au projet Invictus pour que le véhicule puisse participer à trois compétitions, on prenait le risque d'amputer le budget compétitions de Valkyriz. Il a donc fallu faire des compromis.
Le prochain prototype sur lequel vous travaillez (Valkyriz) sera 100 % électrique. Quels sont les principaux défis (techniques) que cela pose ?
Valkyriz est notre premier véhicule électrique, après 20 ans de modèles thermiques et de méthodes optimisées, il nous faut repartir de zéro ou presque. Pour illustrer cet aspect, l’exemple de la batterie me semble le plus parlant. En effet, nous devons allier sécurité, respect du règlement pointilleux du Formula Student et performance dans le choix de la conception de notre batterie Li-ion. Or, le comportement chimique de la batterie nous est méconnu d’autant plus qu’il varie fortement en fonction des conditions extérieures.
Dans un autre registre, la compatibilité électromagnétique est un des autres aspects qui pourraient nous poser problème. En effet, il nous faut gérer les champs magnétiques dans la voiture sachant que certains câbles transportent des tensions de l’ordre de la centaine de Volts !
Pour atteindre vos objectifs, vous pourrez vous appuyer sur le banc d’essai monté dans les locaux de l'École. Pouvez-vous nous le présenter rapidement et les avantages/bénéfices qu’il représente pour l’écurie ?
Une transition à l’électrique ce n’est jamais simple à négocier. Pour que la nôtre se déroule en toute sécurité, l’EPSA a décidé de concevoir un banc d’essai de façon à pouvoir tester les performances de l’ensemble batterie-moteur. Ce banc sera intégré par une entreprise lyonnaise dans un bâtiment de Centrale, sous la responsabilité du département électronique de l’Ecole. Il bénéficie non seulement à l’écurie mais aussi à l’ECL qui le finance en grande partie. En effet, sous la responsabilité du corps enseignant, il pourrait faire l’objet de travaux pratiques en électronique de puissance.
La réussite de L’EPSA cet été est aussi celle de vos partenaires. Que vous apportent-ils concrètement ?
Nos partenaires pédagogiques sont un de nos atouts les plus précieux ! Ce sont des écoles de production de la région lyonnaise : l’Ecole de production La Giraudière, l’Ecole de production Boisard, l’Ecole La Mâche, le lycée professionnel Émile Béjuit, le lycée polyvalent Hector Guimard. Ces partenaires mettent leur savoir-faire, leurs machines, leurs élèves et leur temps au service de l’EPSA en produisant de nombreuses pièces de la voiture. En produisant des pièces complexes telles que notre structure tubulaire ou nos porte-moyeux, ils nous permettent d’atteindre une qualité et une précision sur des pièces réalisées sur-mesure.
Nous nous sommes également récemment rapprochés de l’Ecole de design Strat pour un tout nouveau type de partenariat et l’écurie est évidemment ouverte à tout nouveau partenaire ou sponsor !
1 Commentaire
Bravo l'Ecurie pour ce record inédit dans l'histoire de l'EPSA, PSO
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