

Oriane Charbonnel (17) : La R&D en medtech au service de la fertilité féminine
Les pathologies utérines affectent de nombreuses femmes et restent encore insuffisamment prises en charge, malgré leur impact sur la fertilité et la santé globale. Face à cet enjeu majeur, la medtech joue un rôle clé en développant des solutions innovantes. Oriane Charbonnel, diplômée de Centrale Lyon et responsable R&D chez Womed, contribue à cette avancée en concevant des dispositifs médicaux dédiés à la santé utérine. Elle nous dévoile son parcours, les défis de l’innovation en medtech et son engagement pour améliorer la prise en charge des patientes.
Technica : Bonjour Oriane. Vous venez de débuter un nouvelle aventure professionnelle au sein de la société Womed. Pouvez-vous nous présenter votre rôle et vos principales responsabilités au sein du département R&D ?
Chez Womed, je suis responsable R&D pour la partie dispositifs médicaux, à différencier de la partie pharmaceutique présente au sein de l’entreprise mais qui ne rentre pas dans mes missions. Je suis en charge du développement des nouveaux produits de l’entreprise : cela commence par la définition des besoins des patientes, suivi par une longue phase de réflexions et d’essais pour designer le dispositif permettant de répondre à ces besoins (définition des différents composants du dispositifs et leurs spécifications, définition des procédés utilisés pour fabriquer le dispositif). Lorsque la réflexion est suffisamment avancée pour que l’idée du dispositif finale soit assez claire, une phase de formalisation commence, avec la rédaction de documents et la réalisation de nombreux tests permettant de démontrer la conformité du dispositif avec les normes en vigueur. Cette étape se fait en collaboration avec les autres services de l’entreprise, mais c’est le responsable R&D qui est chargé du suivi et de la coordination.
En plus du développement de nouveaux produits, une partie de mon travail consiste à améliorer les produits existants, avec une part d’optimisation de procédés et de design, notamment pour diminuer les coûts lorsque les quantités produites augmentent.
Technica : Quelles sont les principales activités de la société Womed?
Womed est une start-up qui a été fondée en 2018 suite à un projet de recherche débuté en 2013. Elle fait partie du Réseau Carnot, leader de la recherche partenariale en France. La société est spécialisée dans le traitement des pathologies utérines, qui touchent énormément de femmes et sont en grande majorité mal prises en charge. L’objectif de la société est de développer des dispositifs médicaux permettant de traiter ces pathologies : de la phase initiale de recherche de solutions (design de produits, formulation de médicaments) jusqu’à la production en séries de plus en plus importantes du dispositif. L’environnement des dispositifs médicaux étant très réglementé, une partie importante des activités de l’entreprise est également dédiée à la qualité et aux affaires réglementaires.
Technica : Quels sont les projets sur lesquels vous intervenez actuellement?
Je travaille principalement sur deux projets. Le premier concerne un produit déjà développé et présent sur le marché : le Womed Leaf. Il s'agit d'un dispositif médical marqué CE, qui consiste en un film de polymère inséré dans l’utérus après une opération, afin de former une barrière mécanique entre les parois le temps de la cicatrisation, et empêcher ainsi tous risques d’adhésion.
Il arrive en effet fréquemment qu’après une intervention l’utérus saigne. Les deux parois étant très proches l’une de l’autre, il arrive malheureusement qu’elles cicatrisent ensemble : c’est ce qu’on appelle des adhérences intra-utérines ou "synéchies", Celles-ci entravent le développement de l’embryon et augmentent le risque de fausses-couches et de grossesses extra-utérines. Au cours du temps, elles peuvent aussi entraîner des douleurs pelviennes et perturber le cycle menstruel.
Le second projet sur lequel je travaille concerne le développement d’un produit qui n’est pas encore sur le marché et qui est encore au début de sa phase de conception. Il a vocation à stopper les saignements des femmes se présentant aux urgences avec des saignements utérins abondants.
Technica : Concrètement, comment se déroule le travail de R&D en medtech ?
Le travail de R&D en medtech est très varié. Une partie se déroule sur ordinateur, que ce soit pour la rédaction de protocoles, de rapports, de documents (spécifications, instructions de fabrication, etc.), mais, aussi la gestion de projet (réalisation de planning, suivi de budget, etc.). Je consacre également beaucoup de temps à la conception 3D, ainsi que le traitement de données.
En parallèle, je passe beaucoup de temps soit en laboratoire pour réaliser des essais (essais de traction, dimensionnels mais aussi dans les premières phases de conception, tester ses idées « à la main », avec les moyens à disposition pour vérifier qu’elles vont dans la direction voulue), soit en salle blanche pour travailler sur les procédés de fabrication des dispositifs.
Technica : Vous avez travaillé au sein de la société Arthesys sur un cathéter d’angioplastie. Y a-t-il des compétences acquises là-bas dont vous vous servez aujourd’hui chez Womed ?
Les produits développés par Arthesys sont très différents de ceux de Womed, mais le domaine des dispositifs médicaux reste le même. Si mes connaissances sur les cathéters me servent peu aujourd'hui, celles acquises sur les normes ou les différentes étapes de conception et de mise en production de dispositifs médicaux sont précieuses. Le fait d'avoir travailler dans un système qualité rigoureux est également un atout. De nombreuses méthodes d’analyses sont également similaires avec des règles statistiques à utiliser et des interprétations de résultats à faire. Certaines méthodes d’essais sont également proches, telles que les tests de traction par exemple. Enfin, plus globalement, les compétences de gestion de projet acquises chez Arthesys, me permettent d’être très vite opérationnelle au sein des équipes de Womed.
Technica : Comment se prépare t-on à une nouvelle aventure professionnelle ?
La première étape est de bien terminer son aventure professionnelle précédente : c’est toujours mieux de quitter son poste avec une impression du travail accompli. Cela passe notamment par une bonne transmission des connaissances. Ensuite un temps de coupure est nécessaire afin de débuter sa nouvelle aventure professionnelle dans les meilleures dispositions physiques et mentales. Les premières semaines sont souvent intenses et il faut profiter des quelques jours ou semaines qui précèdent pour régler les détails du quotidien qui pourraient nous accaparer un temps précieux une fois en poste.
Technica : Vous avez très tôt orienté vos expériences professionnelles ainsi que la fin de vos études (M2) dans le secteur de la santé. Quand et comment ce choix s’est-il imposé à vous ?
J’ai été attirée assez tôt par le domaine de la santé. J’ai choisi de faire une prépa scientifique après avoir découvert l’importance des ingénieurs dans le développement des médicaments. A Centrale Lyon, mes envies ont un peu évolué quand j’ai compris que la chimie ne me passionnait pas tant que çà et qu’il existait d’autres façons de travailler dans le médical.
Au cours de mon cursus, je me suis également rendue compte que j’appréciais surtout la partie technique des projets. Dans ma recherche de stages et d’emploi, je me suis donc concentrée sur des postes techniques liés au secteur de la santé, ce qui m’a naturellement orientée vers des postes de R&D dans les dispositifs médicaux. Mes premiers stages ont rapidement confirmé que c’était effectivement ce que je recherchais.
Questionnaire express
Questionnaire express
- 3 adjectifs pour qualifier l’élève que vous étiez à Centrale Lyon ?
Curieuse, impliquée et enthousiaste.
- Un.e camarade de promo avec qui vous traîniez tout le temps ?
Claire Diaz, avec qui j’ai listé, fait du foot et je suis partie à Madagascar.
- Votre matière préférée à Centrale Lyon ?
La physiologie pendant ma 3A.
- Celle que vous appréciez le moins ?
La GM.
- Ce que vous vouliez faire comme « métier » pendant votre formation à l’ECL ?
Je voulais travailler dans la santé, avec un aspect technique.
- Que penserait l’élève que vous étiez s’il découvrait votre parcours pro jusqu’à aujourd’hui ?
Elle serait contente des expériences engrangées et fière de son évolution.
- Un conseil que vous donneriez aux élèves actuellement à Centrale Lyon ?
Côté perso, profitez de ces années, ce sont des moments qu’on ne peut plus revivre par la suite.
Coté pro, les stages sont vraiment un plus, ils permettent de s’orienter plus facilement et sont un bon argument d’embauche au début de la carrière.
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