Nomination de Pascal Ray comme Directeur de l’ECL
Un Rhônalpin à la tête de la première école d’ingénieurs en région
Le 1er décembre dernier, Pascal Ray a été nommé Directeur de l’École Centrale de Lyon. Avant cette nomination, ce Normalien s’est investi dans l’enseignement supérieur et dans le monde de l’industrie. Alors qu’il aborde son mandat avec l’ambition de faire de l’École un « Caltech à la française », il revient sur le parcours d’entrepreneur qui le mène aujourd’hui à Écully après avoir exercé dans les grandes métropoles de la Région.
Bonjour Pascal, tu viens de prendre tes fonctions à la tête de Centrale Lyon. Peux-tu nous parler de la carrière qui t’a conduit à l’École ?
Je suis diplômé de l’ENS Cachan mais mon parcours professionnel s’est essentiellement déroulé dans le monde des écoles d’ingénieurs. J’ai d’ailleurs débuté en contribuant à la création de l’Institut Français de Mécanique Avancée (IFMA) à Clermont-Ferrand. Cette école d’ingénieurs a été créée en 1991 à la demande des industriels de la région Auvergne, Michelin notamment, et avec le soutien de la Région, présidée alors par Valéry Giscard d’Estaing. J’y ai gravi les échelons, en tant que directeur de laboratoire, puis directeur des formations et enfin directeur de l’école entre 2007 et 2014.
L’IFMA est associée au Groupe des Écoles des Mines à partir de 2010. Mais les industriels ont ensuite demandé que la formation puisse réunir l’enseignement de la mécanique et la chimie. C’est pourquoi l’IFMA a fusionné avec l’Ecole Nationale Supérieure de Chimie de Clermont-Ferrand (ENSCCF) pour constituer l’école d'ingénieurs SIGMA Clermont. Je n’ai pas souhaité postuler à la tête du nouvel ensemble et je me suis alors impliqué dans le développement d’une société que j’avais reprise en 2013 comme filiale de l’IFMA. Basée à Clermont, elle propose des services d’ingénierie et d’expertise dans les domaines de la mécanique avancée et des matériaux. C’est un projet que j’ai mené en parallèle de mes fonctions jusqu’en 2017.
Comment poursuis-tu ton parcours dans le monde de l’enseignement supérieur ?
Au sortir de ma direction de l’IFMA, j’ai postulé à la direction de l’École des Mines de Saint-Étienne. Et j’ai été retenu en juillet 2014 pour un mandat de 5 ans, alors que je n’étais pas issu du corps des Mines. Mais je détenais l’expérience du pilotage d’une grande école accueillant plus de 600 élèves-ingénieurs et je connaissais bien l’environnement de l’industrie et un peu celui des Mines. À l’issue de ce mandat, le Ministère souhaite que je le prolonge pour 3 années supplémentaires et je m’interroge alors sur la possibilité de poursuivre dans cette voie ou bien de me consacrer à mon entreprise. Et j’opte pour le monde de l’enseignement supérieur : j’avais déjà passé 12 années dans la direction d’Écoles et j’ai eu envie de continuer dans cette fonction passionnante. Alors que se termine ma mission à l’École des Mines, je me mets en recherche d’un poste similaire en Auvergne Rhône Alpes. J’étais en contact avec Frank Debouck, le Directeur de l’ECL, et j’avais pu échanger avec lui sur le projet ambitieux de l’École à l’horizon 2030. C’est ainsi que j’ai posé ma candidature à sa succession et que j’ai eu le plaisir d’être nommé.
Parle nous de ton projet pour l’ECL
J’aime bien le résumer en évoquant le projet d’un « Caltech à la française ». Le Caltech est d’abord une institution centenaire, comme l’ECL. Créé en 1891 à la périphérie de Los Angeles, le California Institute of Technology figure aujourd’hui au 8ème rang du classement de Shanghai avec des effectifs limités à 1300 étudiants du niveau Graduate, une taille comparable à celle de l’ECL. C’est une performance remarquable quand on compare cet effectif aux 27 000 étudiants de Harvard ou aux 8 000 étudiants de Cambridge…
Le Caltech brille particulièrement dans les domaines de l’ingénierie, de la physique et des sciences de la vie et cette expertise lui a permis de développer par exemple une joint-venture avec la NASA. Ce succès démontre qu’en matière d’enseignement scientifique, il existe une voie vers le « small is beautiful ». Et le Caltech s’appuie sur des valeurs que je partage, telles que diversité, parité et ouverture sociale.
Comment envisages-tu de décliner ce programme pour l’ECL ?
Pour moi, le futur de l’École doit se fonder sur 3 piliers complémentaires, coconstruits en partenariat avec le personnel, les élèves et les alumni.
Le premier de ces piliers, c’est l’engagement responsable, qui doit s’illustrer d’abord par des éco-campus 4.0. L’École doit fonctionner en adéquation avec les grandes transitions, énergétique, environnementale et numérique, en mettant l’humain au cœur de sa démarche. On reproche souvent aux ingénieurs de n’avoir pas été assez présents pour expliquer les technologies, voire d’être responsables des mauvais choix : nous devons remettre la technologie au service de la société, c’est une attente forte des élèves et ils seront associés à la réflexion que nous menons au sein des comités d’orientation.
Le second pilier, c’est notre volonté de donner une chance à chacun : Nous entendons fortement développer notre offre de formation, du niveau Bachelor au niveau Graduate, tout en proposant des passerelles entre ces différents niveaux. Nous allons étoffer notre catalogue de formations permanentes, en direction notamment des alumni souhaitant se réorienter vers une nouvelle carrière. C’est un besoin de plus en plus pressant car la durée de vie d‘une connaissance[1] métier est désormais de 2 ans, contre 30 ans en 1987… Nous devons travailler avec les enseignants-chercheurs dans cette démarche d’ouverture et les impliquer dans une nouvelle approche d’ingénierie pédagogique.
Le dernier pilier, c’est l’excellence qui doit nous permettre de briller sur la scène internationale. Nous devons attirer des enseignants chercheurs de renom, comme le font Cambridge ou le MIT. Et pourquoi pas un prix Nobel ? Bien sûr, cela pose la question de la rémunération de nos enseignants. J’en profite pour signaler que le budget du Caltech est de l’ordre de 700 M$, soit 10 fois supérieur au nôtre … Mais nous pouvons faire appel au fonds de dotation de l’École et nous projetons de renforcer nos ressources propres par des partenariats premium avec les industriels.
Au-delà de l’ECL, quelle est ta vision de la marque « Centrale » ?
Le nom de « Centrale » véhicule une image d’innovation, tirée par l’ensemble des écoles qui le portent. C’est une marque forte que je suis fier de promouvoir avec mes camarades des autres écoles que je côtoie dans le groupe des écoles Centrale. J’y ai déjà des relations privilégiées car Romain Soubeyran, le Directeur de CentraleSupelec, était Directeur des Mines de Paris alors que je dirigeais les Mines de St-Etienne. La force d’une marque partagée, c’est sa capacité à rayonner à l’international. Ensemble, nous devons déployer une stratégie ombrelle, portant les valeurs communes du Développement Durable.
Quels sont tes objectifs pour l’École ?
L’ECL se situe aujourd’hui autour du 8ème rang national. J’aimerais que nous puissions titiller les 5 premières qui sont toutes parisiennes. Et puis nous devons progresser dans les classements internationaux, notamment le classement Impact du Times Higher Education, qui prend en compte les 17 critères du Développement Durable définis par les Nations Unies. Je suis persuadé qu’on peut le faire en se préoccupant précisément des critères de ce classement. C’est un travail de longue haleine mais je l’ai déjà mené pour le compte de l’École des Mines.
Au-delà des classements qui ne sont qu’une mesure de la performance, je souhaite surtout que l’École soit pleinement reconnue comme un acteur des grandes transitions. C’est tout à fait possible : L’ECL est une belle école portée par des équipes motivées. J’aimerais qu’elle continue de se développer en accompagnant cette jeune génération qui veut donner du sens à sa carrière. J’aimerais que nous tous, élèves, personnel et alumni, nous ayons encore plus envie d’afficher avec fierté « Je suis Centrale Lyon ».
[1] https://www.lesechos.fr/idees-debats/cercle/opinion-lobsolescence-des-competences-nest-pas-une-fatalite-1347642
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