Rencontre avec Sabryna Alsfasser (ECL 2001), Facilitator chez Hyper Island
Après une dizaine d’années passées en France et en Allemagne dans le domaine de la Supply Chain, Sabryna Alsfasser s’est envolée avec sa famille vers le Brésil en 2013 pour gérer les projets d’innovation Amériques de la marque Nivea. Depuis 2019, au Brésil d’abord puis maintenant au Chili, elle accompagne les entreprises dans leurs transformations culturelles, digitales et organisationnelles en qualité de « Facilitator » pour la société Hyper Island, surnommée le « Harvard Digital » !
Bonjour Sabryna. Pouvez-vous nous présenter la société Hyper Island et ce qui se cache sous l'intitulé de votre poste de “facilitator" ?
Hyper Island, business school fondée il y a 25 ans sur une petite île suédoise, est maintenant présente dans le monde entier à travers 5 hubs (Stockholm, Londres, Singapour, Miami, São Paulo). Nous aidons entreprises et individus à conduire les transformations culturelles nécessaires pour s’adapter aux changements toujours plus rapides de notre monde digital.
En tant que « facilitator », je construis et anime des sessions de formation pour des équipes de managers de grandes entreprises.
Quels sont généralement les besoins des clients qui font appel à vos services ?
La plupart des grands groupes internationaux ont déjà fait appel à nous pour les aider à développer le potentiel de leurs équipes (Google, Netflix, Carrefour, Nestlé, Oracle, Ikea, LVMH, Visa, Microsoft, etc…). Nous construisons des programmes spécifiques en fonction de leurs besoins : comment être plus créatifs et plus innovants au quotidien ? Comment manager les projets de manière agile en équipes autonomes ? Comment se projeter dans les différents futurs possibles et définir un plan stratégique en fonction ? Comment conduire une transformation digitale de l’entreprise ?
Sur quels projets travaillez-vous actuellement ?
Sur les dernières semaines, j’ai modéré des sessions de marketing pour les équipes de Kraft Heinz, des sessions de gestion agile pour l’équipe Finance de Bayer, et des sessions sur le thème du travail hybride pour les 350 leaders de Heineken au Brésil. En ce moment, je prépare un programme de « Lifelong Learning » pour l’équipe Marketing Amérique Latine de Coca-Cola.
Quels sont les critères qui vous permettent de savoir si vous avez rempli les objectifs fixés par vos clients ?
Peter Drucker disait : « La culture d’entreprise mange la stratégie au petit déjeuner ». Notre objectif, au-delà d’un apprentissage de concepts et méthodologies, est réellement de transformer le « mindset » des participants, c’est-à-dire comment ils pensent et collaborent en équipe. Nous définissions donc avec les clients les comportements souhaités à l’issue du programme, de manière à ce qu’ils puissent évaluer l’évolution de ces comportements au fil du temps (certains programmes durent plusieurs mois, voir plus d’une année pour des transformations profondes qui nécessitent la formation et l’accompagnement de « Change Agents » qui vont diffuser les concepts au sein de toute l’organisation).
La crise sanitaire a-t-elle fait évoluer les besoins de vos clients ?
Avant la pandémie, pratiquement toutes nos sessions se déroulaient en présentiel dans les entreprises ou dans des hôtels pour des workshops de quelques jours. Avec le contexte de crise sanitaire, le home office est devenu la norme et nos clients ont progressivement migré leurs workshops en format online (construction de stratégie, team building, formation des équipes de management).
De votre côté, avez-vous dû adapter vos process ?
Le grand différentiel de Hyper Island réside dans la dynamique des sessions : un contenu assez court qui provoque les participants à penser différemment et à sortir de leur zone de confort, ensuite un travail en petits groupes pour appliquer le nouveau concept appris, enfin un échange sur les « insights » découverts pendant cette expérimentation. Avec le passage en online, nous avons dû explorer au maximum les possibilités technologiques pour maintenir l’engagement et l’attention des participants au cours des sessions (la tentation de lire les e-mails en retard est toujours grande !). Nous utilisons donc Zoom pour pouvoir diviser les participants en petits groupes de travail dans des salles online, et des applications comme Mentimeter ou Miro pour les faire interagir de manière ludique et interactive.
Même si maintenant les entreprises souhaitent un retour progressif au présentiel, on observe que le format online est voué à perdurer, ou tout du moins va coexister avec le présentiel dans un mode « hybride » : certaines sessions courtes se font online, et d’autres sessions plus longues se font en présentiel, lors d’un workshop au vert par exemple (meilleur moyen de tirer les managers de l’emprise du quotidien pour collaborer sur l’élaboration de la stratégie par exemple).
Dans votre carrière, vous avez géré de nombreux projets en supply chain, puis en 2019 vous semblez vous être davantage recentrée sur l'accompagnement humain. Pourquoi ce switch ?
Après une dizaine d’années en Supply Chain, plus quelques années dans la gestion de projets d’innovation cosmétique, j’avais l’impression de faire du sur place et de ne rien apprendre de nouveau. J’avais envie de sortir de ma zone de confort, et surtout d’aider les entreprises à faire évoluer les mentalités et méthodes de travail. Aujourd’hui, je « prêche » des valeurs et des méthodes auxquelles je crois profondément et qui font malheureusement encore défaut dans beaucoup d’équipes : avoir le courage d’exposer sa vulnérabilité, donner mais aussi demander du feedback, développer de manière rapide le prototype d’une idée pour la tester avec le client et ajuster la prochaine version, faire des erreurs pour apprendre et progresser.
Je travaille dans 3 langues (portugais, anglais, espagnol), je découvre les défis et le business de dizaines d’entreprises chaque année, et surtout j’apprends chaque jour et partage ce plaisir en sortant les participants de leur quotidien et en les invitant à penser de manière différente.
Vous vivez et travaillez aujourd'hui depuis le Chili. Pourquoi ce choix ?
En tant que couple d’ingénieurs, nous avons fait le choix il y a plus de 10 ans de vivre une vie d’expatriés, et nous ne changerions pour rien au monde ! Nous avons eu la chance de connaître 3 pays / cultures et de s’y sentir « chez nous » à chaque fois : l’Allemagne d’abord pendant presque 3 ans, le Brésil ensuite pendant 7 ans, et depuis juillet 2020 le Chili. A chaque fois, bouger d’un pays à l’autre a été le résultat d’une opportunité professionnelle qui s’est présentée. Et bien sûr, à chaque fois, il faut se réinventer : laisser ses amis dans le pays que l’on quitte, apprendre une nouvelle langue, faire face aux défis administratifs de l’installation. Pas toujours facile, mais toujours l’occasion de découvrir de nouvelles personnes, des plats différents, des coutumes locales, des lieux insolites… Bref, on ne s’ennuie jamais ! Le Chili offre des paysages naturels splendides, alors on profite de nos années ici pour voyager et connaître déserts, volcans, et lacs sur ses quelques 4300km de long.
Si on vous proposait de partir dans quelques années vivre dans un autre coin du globe, quelle ville choisiriez-vous et pourquoi ?
Aucune idée ! On ne sort pas indifférent d’une décennie en Amérique Latine… Je me suis habituée au temps ensoleillé, aux gens accueillants et souriants, à l’optimisme général. On verra où la prochaine opportunité nous mènera, mais ce qui est sûr, c’est qu’un retour en France n’est pas au programme. 😉
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